ONG de développement ou ONG de plaidoyer ?
Il existe près de 160 000 associations au Maroc, mais beaucoup d’entre elles sont d’une grande vulnérabilité institutionnelle aussi bien sur le plan des ressources que sur celui de leur gouvernance. Cette faiblesse peut empêcher la société civile d’exercer cette très grande responsabilité qui lui a été confiée par la Constitution de 2011. L’enjeu est crucial : il s’agit que la société civile puisse être en capacité de jouer le rôle qui est attendu d’elle dans l’Edification d’un Etat de Droit et d’une démocratie participative.
Dans ce nouveau cadre constitutionnel, les associations qui souhaitent jouer un rôle important doivent s’interroger sur les cinq points suivants :
La mission de l’association - Le statut associatif est un cadre juridique qui couvre de nombreuses réalités. Néanmoins ce cadre n’est pas suffisant pour définir le rôle d’une association. Quelle est la mission fondamentale de l’association : “ Suis- je une ONG marocaine avec une ambition de développement humain ou un groupement de personnes poursuivant des intérêts particuliers ? ”
Le positionnement de l’association - Dans le secteur associatif des ONG marocaines, il existe deux positionnements identitaires : les ONG de développement et les ONG de plaidoyer. Les premières sont issues de l’histoire de la coopération internationale depuis trente ans et sont devenues des références dans l’ingénierie de projets de développement. Néanmoins ces ONG de développement n’ont pas véritablement intégré la logique de plaidoyer post 2011. Les ONG de plaidoyer sont plus récentes et ont été fondé par des militants des droits humains. Elles excellent dans les processus de plaidoyer mais elles ne sont pas des spécialistes de l’ingénierie de projet : “ Comment dois -je positionner mon ONG ? ONG de plaidoyer et/ou ONG de développement ? Avec quels moyens ? …”
La gouvernance de l’association - Les organes de gouvernance sont certes définies par le cadre juridique du statut associatif mais est-ce suffisant pour disposer d’une gouvernance positive et dynamique ? La formulation d’une feuille de route institutionnelle pour la durée des mandats est souhaitable afin de disposer d’un référentiel pour l’action : “ Disposons-nous d’un cadre clair, partagé et explicite pour guider l’action de nos membres et de nos salariés ? “
Le financement de l’association - L’argent c’est le nerf de la guerre et les associations se font la guerre pour obtenir des financements. Les logiques actuellement en oeuvre au Maroc sont au nombre de deux. Les ONG de développement se financent par les projets des organisations internationales. Elles deviennent souvent dépendantes des orientations stratégiques des organisations internationales au détriment parfois de leur mission initiale. Les ONG de plaidoyer reposent fondamentalement sur l’engagement de militants bénévoles. Mais le bénévolat a un prix : l’usure du temps. La question est la suivante : “ Comment accéder à des budgets de développement tout en diversifiant les sources de financement par des levées de fonds pour financer l’activité de plaidoyer ? “
La constitution d’un réseau associatif - Pour renforcer les capacités institutionnelles des associations un des leviers est celui d’un regroupement en réseau associatif afin de démultiplier l’impact et la durabilité des activités. La logique de réseau pour être efficace implique de sélectionner des membres partageant une vision commune. Mais ce n’est pas suffisant. Le réseau doit se doter d’un cadre institutionnel pour assurer les arbitrages, diffuser les bonnes pratiques, assurer la formation et développer la communication. Cette logique de réseau peut se heurter rapidement à des rivalités entre associations. Un des scénarios de dépassement de ces rivalités est de choisir l’une d’entre elles comme association intermédiaire. Cette association intermédiaire est le chef de file du réseau et c’est une référence pour toutes les parties prenantes. La question est la suivante : “ Dois-je constituer un réseau associatif et avons nous les qualités suffisantes pour assurer un rôle d’association intermédiaire entre le tissu associatif et les partenaires de développement ? “